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Sujet : Vous ferez le commentaire de l'un de ces deux textes (extrait de Césaire ou de Cyrano de
Bergerac), au choix.
Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, 1950.
Mais parlons des colonisés.
Je vois bien ce que la colonisation a détruit : les admirables civilisations indiennes et que ni
Deterding, ni Royal Dutch, ni Standard Oil ne me consoleront jamais des Aztèques ni des Incas.
Je vois bien celles-condamnées à terme-dans lesquelles elle a introduit un principe de ruine :
Océanie, Nigéria, Nyassaland. Je vois moins bien ce qu'elle a apporté.
Sécurité ? Culture ? Juridisme ? En attendant, je regarde et je vois, partout où il y a, face à face,
colonisateurs et colonisés, la force, la brutalité, la cruauté, le sadisme, le heurt et, en parodie de la
formation culturelle, la fabrication hâtive de quelques milliers de fonctionnaires subalternes, de boys,
d'artisans, d'employés de commerce et d'interprètes nécessaires à la bonne marche des affaires.
J'ai parlé de contact.
Entre colonisateur et colonisé, il n'y a de place que pour la corvée, l'intimidation, la pression,
la police, l'impôt, le vol, le viol, les cultures obligatoires, le mépris, la méfiance, la morgue, la suffisance,
la muflerie, des élites décérébrées, des masses avilies.
Aucun contact humain, mais des rapports de domination et de soumission qui transforment
l'homme colonisateur en pion, en adjudant, en garde-chiourme, en chicote et l'homme indigène en
instrument de production.
À mon tour de poser une équation : colonisation = chosification.
J'entends la tempête. On me parle de progrès, de « réalisations », de maladies guéries, de
niveaux de vie élevés au-dessus d'eux-mêmes.
Moi, je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, de cultures piétinées, d'institutions minées, de
terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d'extraordinaires
possibilités supprimées.
On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de
chemins de fer.
Moi, je parle de milliers d'hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux qui, à l'heure où
j'écris, sont en train de creuser à la main le port d'Abidjan. Je parle de millions d'hommes arrachés à
leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la vie, à la danse, à la sagesse.
Je parle de millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe
d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme.
On m'en donne plein la vue de tonnage de coton ou de cacao exporté, d'hectares d'oliviers ou
de vignes plantés.
Moi, je parle d'économies naturelles, d'économies harmonieuses et viables, d'économies à la
mesure de l'homme indigène désorganisées, de cultures vivrières détruites, de sous-alimentation
installée, de développement agricole orienté selon le seul bénéfice des métropoles, de rafles de
produits, de rafles de matières premières.
On se targue d'abus supprimés.
Moi aussi, je parle d'abus, mais pour dire qu'aux anciens - très réels - on en a superposé
d'autres très détestables. On me parle de tyrans locaux mis à la raison; mais je constate qu'en
général ils font très bon ménage avec les nouveaux et que, de ceux-ci aux anciens et vice-versa, il s'est
40 établi, au détriment des peuples, un circuit de bons services et de complicité.
On me parle de civilisation, je parle de prolétarisation et de mystification.


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Commentaire sur le texte extrait du Discours sur le colonialisme d'Aimé Césaire

Le texte extrait du Discours sur le colonialisme d'Aimé Césaire dénonce les conséquences néfastes de la colonisation. L'auteur met en évidence les destructions causées par la colonisation, telles que la disparition des civilisations indiennes et les ruines introduites dans certaines régions. Césaire souligne également les rapports de domination et de soumission entre les colonisateurs et les colonisés, qui transforment l'homme colonisateur en instrument de pouvoir et l'homme indigène en instrument de production  .

L'auteur critique les prétendus bienfaits de la colonisation, tels que la sécurité, la culture et le juridisme, en soulignant qu'il n'y a en réalité aucun contact humain entre les deux parties. Au contraire, il y a une corvée, une intimidation, une pression, une police, un vol, un viol, des cultures obligatoires, du mépris et de la méfiance. Césaire dénonce également la prolétarisation et la mystification induites par la colonisation, ainsi que les abus qui persistent malgré les prétendues améliorations.

L'auteur met en évidence les conséquences dévastatrices de la colonisation sur les sociétés colonisées, telles que la vidange de leur identité, la destruction de leurs cultures, la confiscation de leurs terres, l'assassinat de leurs religions, la suppression de leurs magnificences artistiques et la suppression de leurs extraordinaires possibilités. Il critique également le développement agricole orienté uniquement vers le bénéfice des métropoles, la rafle de produits et de matières premières, ainsi que la complicité entre les anciens tyrans locaux et les nouveaux colonisateurs .

En conclusion, le texte extrait du Discours sur le colonialisme d'Aimé Césaire dénonce les conséquences destructrices de la colonisation, remettant en question les prétendus bienfaits et soulignant les rapports de domination et de soumission qui caractérisent cette période de l'histoire  .