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Mardi 9 juin

Aujourd'hui, cela a été encore pire qu'hier. Je suis éreintée comme si j'avais fait une promenade de cinq kilomètres. J'ai la figure tendue par l'effort
que j'ai fait tout le temps pour retenir des larmes qui jaillissaient je ne sais pourquoi.

Ce matin, j'étais restée à la maison, à travailler du violon. Dans Mozart, j'avais tout oublié.

Mais cet après-midi tout a recommencé, je devais aller chercher Vivi Lafon à la sortie de l'agreg [l'agrégation d'anglais] à deux heures. Je ne voulais pas porter l'étoile, mais j'ai fini par le faire, trouvant
lâche ma résistance. Il y a eu d'abord deux petites filles avenue de La Bourdonnais qui m'ont montrée du
doigt. Puis, au métro à l'Ecole-Militaire (quand je suis descendue, une dame m'a dit : << Bonjour,
mademoiselle >>), le contrôleur m'a dit : « Dernière voiture. » Alors, c'était vrai le bruit qui avait couru hier.
Cela a été comme la brusque réalisation d'un mauvais rêve. Le métro arrivait, je suis montée dans la première
voiture. Au changement, j'ai pris la dernière. Il n'y avait pas d'insignes. Mais rétrospectivement, des larmes de douleur et de révolte ont jailli à mes yeux, j'étais obligée de fixer quelque chose pour qu'elles rentrent.

Je suis arrivée dans la grande cour de la Sorbonne à deux heures tapantes, j'ai cru apercevoir Molinié au
milieu, mais, n'étant pas sûre, je me suis dirigée vers le hall au bas de la bibliothèque. C'était lui, car il est venu
me rejoindre. Il m'a parlé très gentiment, mais son regard se détournait de mon étoile. Quand il me regardait,
c'était au-dessus de ce niveau, et nos yeux semblaient dire : « N'y faites pas attention. » Il venait de passer sa
seconde épreuve de philo.

Puis il m'a quittée et je suis allée au bas de l'escalier. Les étudiants flânaient, attendaient, quelques-uns me
regardaient. Bientôt, Vivi Lafon est descendue, une de ses amies est arrivée et nous sommes sorties au soleil.
Nous parlions de l'examen, mais je sentais que toutes les pensées roulaient sur cet insigne. Lorsqu'elle a pu me
parler seule, elle m'a demandé si je ne craignais pas qu'on m'arrache mon bouquet tricolore, et ensuite elle m'a
dit : « Je ne peux pas voir les gens avec ça. » Je sais bien; cela blesse les autres. Mais s'ils savaient, eux, quelle
crucifixion c'est pour moi. J'ai souffert, là, dans cette cour ensoleillée de la Sorbonne, au milieu de tous les
camarades. Il me semblait brusquement que je n'étais plus moi-même, que tout était changé, que j'étais devenue
étrangère, comme si j'étais en plein dans un cauchemar. Je voyais autour de moi des figures connues, mais je
sentais leur peine et leur stupeur à tous. C'était comme si j'avais eu une marque au fer rouge sur le front. [...]
Hélène Berr, Journal 1942-1944, Tallandier, 2007

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Merci d’avance


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