Après cette violente dispute, Hans décide d'écrire une lettre à Conrad pour lui expliquer qu'il souhaite encore être son ami malgré ses révélations. Il évoque avec nostalgie les moments passés tout en développant les différents sentiments qu'il éprouve désormais envers Conrad Ton texte fera au moins deux pages.
Voici le texte :
Un soir, alors qu'ils étaient à l'Opéra, Conrad et ses parents sont passés devant Hans sans le regarder. Le lendemain, ce dernier demande alors des explications à son ami.
<< Écoute, Conrad, dis-je, tu sais parfaitement bien que j'ai raison. Crois-tu que je ne me rende pas compte que tu ne m'as invité chez toi que lorsque tes parents étaient absents ? Crois-tu vraiment que j'aie imaginé des choses, hier soir ? Il me faut savoir où j'en suis. Je ne veux pas te perdre, tu le sais... J'étais seul avant ta venue et je serai encore plus seul si tu me rejetais, mais je ne puis supporter l'idée que tu as trop honte de moi pour me présenter à tes parents. Comprends-moi. Je ne me soucie guère de relations sociales avec tes parents, sinon une fois pour cinq minutes, de façon à ne pas me sentir un intrus chez toi. D'ailleurs, je préfère être seul plutôt qu'humilié. Je vaux autant que tous les Hohenfels du monde. Sache que je ne permettrai à personne de m'humilier, fût-il roi, prince ou comte. >>>
Courageuses paroles, mais j'étais maintenant au bord des larmes et n'eus guère pu poursuivre si Conrad ne m'avait interrompu. << Mais je n'ai aucune envie de t'humilier. Comment le pourrais-je ? Tu es, tu le sais, mon seul ami. Et tu sais que je t'aime plus que quiconque. Tu sais que j'étais seul, moi aussi, et que si je te perdais, je perdrais l'unique ami en qui je puisse avoir confiance, Comment aurais- je pu avoir honte de toi ? Toute la classe ne connaît-elle pas notre amitié ? N'avons-nous pas voyagé ensemble tout alentour? T'est-il jamais venu à l'idée que j'avais honte de toi ? Et tu oses insinuer' une chose pareille!
Oui, dis-je, maintenant plus calme, je te crois. Je te crois entièrement. Mais pourquoi, hier, étais-tu si différent? Tu aurais pu me parler un instant et te montrer conscient de mon existence. Je n'attendais pas grand-chose. Juste un signe de tête, un sourire, un geste de la main, cela eût suffi. Pourquoi es-tu si différent quand tes parents sont là ? Pourquoi n'ai-je pas fait leur connaissance ? Tu connais mon père et ma mère. Dis-moi la vérité. Il doit y avoir une raison pour que tu ne m'aies pas présenté à eux et la seule raison qui me vienne à l'esprit est que tu crains que tes parents ne soient réprobateurs¹ à mon égard. >>>
Il hésita un moment. « Hé bien, dit-il, tu l'as voulu, George Dandin, tu l'as voulu Tu veux la vérité, tu l'auras. Comme tu l'as vu et comment pouvais-tu ne pas le voir - je n'ai pas osé te présenter. La raison, j'en jure par tous les dieux, n'a rien à voir avec le fait d'être honteux - là, tu es dans l'erreur- et est beaucoup plus simple et plus désagréable. Ma mère descend d'une famille polonaise distinguée, jadis royale, et elle hait les Juifs. Pendant des centaines d'années, les Juifs n'existaient pas pour les gens de cette sorte, ils étaient plus vils que les serfs, l'excrément de la terre, des intouchables? Elle déteste les Juifs. Elle en a peur, bien qu'elle n'en ait jamais rencontré un seul. Si elle était mourante et que ton père pût la sauver, je ne suis pas certain qu'elle le ferait appeler.
Fred Uhlman, L'Ami retrouvé (1971), traduit par Léo Lack Éditions Gallimard
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