ESSAIS SCEPTIQUES B. RUSSELL
On raconte une anecdote
sur Pyrrhon, le fondateur du pyrrhonisme (lequel est l'ancien nom
du scepticisme). Il affirmait que nous ne savons jamais assez pour
être sûrs qu'une manière d'agir est plus sage qu'une autre : dans
sa jeunesse, un après-midi qu'il faisait sa promenade quotidienne,
il aperçut son maître de philosophie, auquel il avait emprunté ses
principes, la tête plongée dans un fossé et impuissant à se dégager.
Après l'avoir contemplé quelque temps, il continua sa promenade,
considérant qu'il n'y avait pas une raison suffisante de
penser qu'il
ferait une bonne action en retirant le vieillard du fossé. D'autres,
moins sceptiques, le sauvèrent et reprochèrent à Pyrrhon sa
cruauté. Mais son maître, fidèle à ses principes, le loua pour sa
logique. Or, je ne défends pas un scepticisme aussi héroïque. Je
suis prêt à admettre les croyances ordinaires du sens commun, en
pratique, sinon en théorie. Je suis prêt à reconnaître tout résultat
scientifique bien établi, non comme absolument vrai, mais comme
suffisamment probable pour fournir la base d'une action ration-
nelle. Quand on prédit une éclipse de lune pour une certaine date,
je pense que cela vaut la peine d'aller voir et de se convaincre si
elle se produit. Pyrrhon n'aurait pas pensé ainsi. Pour cette
raison, je me crois justifié si j'affirme que je défends une position
moyenne.
Il y a des sujets sur lesquels s'accordent ceux qui les ont
étudiés: par exemple, les dates des éclipses. Il y en a d'autres sur
lesquels les spécialistes ne sont pas d'accord. Même quand ils sont
tous d'accord, ils peuvent bien se tromper. L'opinion d'Einstein
sur l'importance de la déviation subie par la lumière sous l'in-
fluence de la gravitation aurait été rejetée par tous les spécialistes
il a vingt ans, et pourtant c'est elle qui s'est trouvée vraie.
Néanmoins, l'opinion des spécialistes, quand elle est unanime,
doit être considérée par les non-spécialistes comme plus probable-
ment vraie que l'opinion opposée. Le scepticisme dont je suis
partisan se ramène à ceci seulement : 1° : que lorsque les spécialistes
sont d'accord, l'avis opposé ne peut être considéré comme certain;
2º: que lorsqu'ils ne sont pas d'accord, aucun avis ne peut être
considéré comme certain par le non-spécialiste; et, 3°: que
lorsqu'ils estiment tous qu'il n'y a aucune raison suffisante pour
un avis certain, l'homme ordinaire ferait bien de suspendre son
jugement.
Question :
1) En quoi le scepticisme de Russell se distingue
celui de Pyrrhon ?
2) Si la vérité absolue est inconnaissable
À quel critère doit-on se fier selon Russell?
3) récapituler à votre façon les 3 principes de son scepticisme modéré
4) en quoi ces trois principes changerait l’attitude et la vie des hommes donnez un exemple
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